Emmanuel Macron sait lire les sondages. Alors qu’il décroche dans l’opinion et que seuls 29 % des Français considèrent que sa politique est « juste », le président de la République a saisi l’occasion de son deuxième discours à Versailles pour tenter de recadrer son image. S’il faut toujours fabriquer le « gâteau » avant de le redistribuer, finie la théorie du « ruissellement » et des « premiers de cordées ». La lutte contre « les inégalités de destin » exige des politiques actives et l’engagement de tous. Attention aux classes moyennes et populaires qui se révolteraient !
Le chef de l’Etat reste un libéral. Pas de social sans une économie forte. D’où le souci de libérer les forces des entreprises, seules créatrices de richesses, l’Etat devant « faciliter l’initiative ». Mais pas question de se laisser taxer de « président des riches » ! Son projet vise à l’amélioration de la vie de tous les Français. C’est un projet à co-construire avec tous. Hier, Emmanuel Macron a découvert les vertus de l’humilité, de la concertation, de l’utilité des corps intermédiaires. Et même des parlementaires ! Il est prêt à modifier la Constitution pour être autorisé à rester écouter les présidents de groupes à Versailles et à leur répondre. Une mesure proposée par Les Républicains la semaine dernière à l’Assemblée nationale et rejetée par la majorité En Marche… Preuve que beaucoup se décide à l’Elysée et que les députés LREM ne rechignent pas à manger leur chapeau.
Dans son élan, Emmanuel Macron annonce un « Etat Providence du XXIème siècle, émancipateur, efficace, universel, responsabilisant ». Plutôt financé par l’impôt, il abandonne le modèle bismarckien de l’assurance collective pour celui anglo-saxon de la solidarité nationale avec « droits et devoirs ». La réforme des retraites servira de test. Contrairement à ce qui est dit, l’instauration de points ne favorise pas les carrières hachées puisque ne seront plus retenues les 25 meilleures années. A suivre…
Face à la « peur civilisationnelle », le chef de l’Etat retrouve les voies de la République, faites d’ordre et de respect. Au point que son discours semblait inspiré par les grandes figues de la IIIème du nom. Jusque dans l’éloge de la laïcité, alors qu’il hésitait dans son interprétation de la loi de 1905. A une réserve près : lorsqu’il parle de « concorde retrouvée », Emmanuel Macron songe-t-il à un nouveau « concordat » ? Ce qui mettrait le feu aux poudres.
Ferme sur le droit d’asile, résolu sur l’Europe, le président de la République n’a pas craint de recourir à un « patriotisme vivifié ». Pour affirmer que « notre seule idéologie, c’est la grandeur de la France ». La ficelle populaire est un peu grosse, même s’il s’agit de « nation » et non de « nationalisme », une sorte de populisme high tech, en somme. Entre l’ouverture au grand large et le repli sur soi, Emmanuel Macron cherche le « progressisme ». Hier, il a semblé roder son thème pour les élections européennes du printemps prochain.