Archives mensuelles : juin 2017

Confiscation

Ainsi Emmanuel Macron grille-t-il la politesse à Edouard Philippe en s’exprimant devant le Congrès la veille du discours de politique générale du Premier ministre. Les deux intéressés démentent toute intention d’humiliation. Il s’agit certes d’une application des institutions présidentialistes de la Vème République que ne renieraient ni De Gaulle ni François Mitterrand. Reste que beaucoup se sont indignés des propos de Nicolas Sarkozy sur son « collaborateur » François Fillon. Emmanuel Macron signifie que le chef du gouvernement est l’exécutant de sa politique. Il y ajoute un effet de loupe.

Ce pouvoir prétendrait-il à l’absolu ? Ce qui se passe à l’Assemblée nationale inquiète davantage que la mise en scène de la soumission du Premier ministre. La manœuvre des « constructifs » pour faire élire Thierry Solère questeur au titre de l’opposition mais avec les voix de la majorité présidentielle consacre l’hégémonie de celle-ci parmi les députés. Et remet en cause les droits des parlementaires et la séparation des pouvoirs. Quelques principes démocratiques se trouvent ainsi piétinés. Ce qui laisse mal augurer du fonctionnement futur de l’Assemblée et de la valeur des échanges qui vont s’y dérouler. L’invective risque de tenir souvent lieu de débat et l’insulte, d’argument. Continuer la lecture

Etre « constructif » et « disruptif » à la fois

« Constructifs » ! Le mot envahit la politique ces jours-ci. La droite se veut constructive, celle qui se présente comme « macroncompatible » et celle qui entretient le « canal historique ». Mais pourquoi, diable, se scinde-t-elle ? La différence ne concernerait-elle que les projets de loi qu’elle est prête ou non à accompagner de sa réflexion, de ses propositions, voire de son vote ?

La gauche socialiste se présente aussi sous les couleurs du constructif. Pas question de « robotisation » ni de refus pavlovien de ce qui vient de l’Elysée. Il s’agira de proposer également, de faire évoluer dans le bon sens. Lequel ne saurait être celui que préconise la droite. La construction avancera donc à hue et à dia. Ce qui ne garantit pas sa stabilité. Continuer la lecture

Députés sous épée de Damoclès

A peine élus et déjà menacés ! Les 577 députés qui investissent l’Assemblée nationale ces jours-ci ont raison de savourer leur bonheur. Pour plus d’un cinquième d’entre eux, leurs jours sont comptés. Le Premier ministre a confirmé l’intention du président de la République de réduire le nombre des parlementaires. S’il est possible de descendre à 400 députés, s’en tenir à 450 serait déjà appréciable. Ce qui correspond à une baisse de 22 %.

Convaincue que ces élus ne servent pas à grand chose, l’opinion applaudira. Les intéressés peineront sans doute à se faire harakiri et quelques marchandages auront lieu. D’autant que l’accord du Sénat s’impose puisqu’il est question de réduire aussi le nombre des sénateurs, ce qui passe par une loi organique. Des négociations devront avoir lieu. Continuer la lecture

Où sont passées les voix de droite ?

Du premier tour de la présidentielle à celui des législatives, l’image prévaut d’un bloc de droite qui se maintient autour de 20 % des suffrages exprimés, quels que soient les aléas de la conjoncture. Image trompeuse due aux variations de la participation. Au regard du score de François Fillon, les candidats LR et UDI perdent presque 2 millions de voix, soit 4,2 % des inscrits. Au profit d’un vote en faveur de République en marche et, surtout, de l’abstention.

Selon certains sondages, 38 % des électeurs de François Fillon se seraient abstenus dimanche dernier. C’est plus que le total des suffrages manquants, mais il y a pu y avoir des mobilisations accrues sur certains candidats ou moins du rejet lié aux affaires de l’ancien Premier ministre. Cela témoigne d’une conscience des règles de la Ve République, qui visent à donner une majorité au président élu depuis que les législatives suivent la présidentielle. La droite reste gaullienne sur les institutions et accorde plus d’importance à l’exécutif qu’au législatif. S’abstenir, c’était laisser les macronistes gagner. Continuer la lecture

Oser vraiment la confiance

Pour restaurer la confiance, faut-il d’abord exprimer sa méfiance ? Le projet de loi de moralisation de la vie publique présenté ce mercredi en conseil des ministres offre un arsenal de mesures susceptibles d’éviter toute dérive chez les élus. Ce n’est pas le premier. Gageons que ce ne sera pas le dernier.

Au-delà du fait que le texte soit porté par un François Bayrou en difficulté là où il se voulait exemplaire, le corsetage des hommes et des femmes publics s’expose à l’éternelle course poursuite du gendarme et du voleur. Les règles risquent d’être contournées, entraînant d’autres mesures plus coercitives, elles-mêmes soumises à dévoiement. Surtout, ce cercle infini trahit une profonde méfiance à l’égard de ceux qui exercent un mandat politique. Continuer la lecture

Vous avez dit « cohérence » ?

Alain Juppé soutient activement son ancienne collaboratrice, responsable de sa campagne numérique pour la primaire, dans la 10e circonscription des Yvelines. Seul problème : Aurore Bergé a reçu l’onction de La République en marche et se présente contre Jean-Frédéric Poisson, président du parti Chrétien démocrate, investi par les Républicains ! Le maire de Bordeaux avait assuré qu’il soutiendrait les candidats LR et UDI.

L’ancien Premier ministre est coutumier du fait. Lors des municipales de 2014, il avait tenu meeting commun avec Pierre-Mathieu Duhamel, candidat dissident à Boulogne-Billancourt contre le maire sortant investi par LR. Un ancien collaborateur là aussi. Alain Juppé préfèrerait-il ses seconds à son parti ? « J’ai refusé de soutenir d’anciens collaborateurs candidat d’En marche », souligne Xavier Bertrand, « il n’est interdit à personne d’être cohérent ». Continuer la lecture

Ministres en excès de tweets

Un Garde des Sceaux qui retweete le communiqué de Marielle de Sarnez se défendant face aux accusations d’emploi fictif de ses collaborateurs; un ministre de L’Action et des comptes publics qui menace par tweet de publier des informations fiscales à l’encontre d’un député LR… La passion politique et le temps orageux rendent nerveux. Au point d’oublier les « devoirs de sa charge », comme il se disait autrefois. Lorsque le mot devoir avait un sens et n’apparaissait pas comme un épouvantail.

Les magistrats n’ont pas apprécié l’initiative d’un François Bayrou plus enclin à soutenir une collègue amie qu’à garantir l’indépendance de la Justice. Gérald Darmanin a oublié un peu vite que le ministre en charge des impôts est tenu au secret fiscal. Engager un contrôle fut parfois dissuasif. Menacer de rendre publiques des demandes d’interventions relève d’un âge que le nouveau Président est censé enterrer.
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