Archives de catégorie : Humeur

Une exigence de clarté

Exclure ou non ? Les Républicains ont sans doute trop tardé à se séparer de ceux qui ont choisi de faire bande à part. En acceptant Matignon, Edouard Philippe a fait campagne contre certains de ses anciens amis et est devenu chef d’une majorité qui ne compte pas LR en son sein. Avec lui, les « constructifs », pas si nombreux que cela d’ailleurs, se sont mis hors du parti. La cohérence aurait voulu que ce soit eux qui démissionnent. Mais comment opter pour la clarté quand on s’inscrit sous le signe du ni-ni ou du et-et. Le bric et le broc en fait.

« Si on veut séduire, avancer, on n’exclut pas », affirme Jean-Louis Debré. Sans doute son gaullisme se veut-il syncrétique, reprenant l’image de Malraux de la sortie du métro à 18 heures. Mais il s’agissait de rassembler les Français plus que des élus tentés par « la petite cuisine » politicienne. Et si l’expression de différentes sensibilités dans un parti nourrit le débat, cela n’autorise pas à prendre des positions contraires aux orientations majoritaires. Le Parti socialiste ne meurt-il pas d’avoir entretenu des gauches « irréconciliables » ?

L’ancien président de l’Assemblée nationale se souvient peut-être du temps où le RPR comptait toujours Edouard Balladur parmi ses députés alors que celui-ci s’était présenté contre Jacques Chirac à la présidentielle. Sauf que Jacques Chirac avait gagné. Il n’en a pas moins souffert et son Premier ministre Alain Juppé encore plus d’une majorité restée en grande partie balladurienne. Ce qui l’a poussé à la dissolution malheureuse de 1997.

Les « constructifs » d’aujourd’hui ont choisi une ligne différente de celle de LR. A l’Assemblée nationale, ils sont ultra-minoritaires : 12 députés sur 112. Une minorité bien payée par le président de la République (trois ministres, dont le premier) mais cette récompense n’engage qu’eux. Et s’ils sont convaincus que les partis politiques ne servent plus à grand chose, pourquoi vouloir y rester ?

Le vote du budget constitue le critère d’appartenance ou non à une majorité parlementaire. Quatre ou cinq députés « constructifs » viennent d’approuver la partie recettes du projet de loi de finances 2018. La messe est dite.

Etre « constructif » et « disruptif » à la fois

« Constructifs » ! Le mot envahit la politique ces jours-ci. La droite se veut constructive, celle qui se présente comme « macroncompatible » et celle qui entretient le « canal historique ». Mais pourquoi, diable, se scinde-t-elle ? La différence ne concernerait-elle que les projets de loi qu’elle est prête ou non à accompagner de sa réflexion, de ses propositions, voire de son vote ?

La gauche socialiste se présente aussi sous les couleurs du constructif. Pas question de « robotisation » ni de refus pavlovien de ce qui vient de l’Elysée. Il s’agira de proposer également, de faire évoluer dans le bon sens. Lequel ne saurait être celui que préconise la droite. La construction avancera donc à hue et à dia. Ce qui ne garantit pas sa stabilité. Continuer la lecture

Vous avez dit « cohérence » ?

Alain Juppé soutient activement son ancienne collaboratrice, responsable de sa campagne numérique pour la primaire, dans la 10e circonscription des Yvelines. Seul problème : Aurore Bergé a reçu l’onction de La République en marche et se présente contre Jean-Frédéric Poisson, président du parti Chrétien démocrate, investi par les Républicains ! Le maire de Bordeaux avait assuré qu’il soutiendrait les candidats LR et UDI.

L’ancien Premier ministre est coutumier du fait. Lors des municipales de 2014, il avait tenu meeting commun avec Pierre-Mathieu Duhamel, candidat dissident à Boulogne-Billancourt contre le maire sortant investi par LR. Un ancien collaborateur là aussi. Alain Juppé préfèrerait-il ses seconds à son parti ? « J’ai refusé de soutenir d’anciens collaborateurs candidat d’En marche », souligne Xavier Bertrand, « il n’est interdit à personne d’être cohérent ». Continuer la lecture

Ministres en excès de tweets

Un Garde des Sceaux qui retweete le communiqué de Marielle de Sarnez se défendant face aux accusations d’emploi fictif de ses collaborateurs; un ministre de L’Action et des comptes publics qui menace par tweet de publier des informations fiscales à l’encontre d’un député LR… La passion politique et le temps orageux rendent nerveux. Au point d’oublier les « devoirs de sa charge », comme il se disait autrefois. Lorsque le mot devoir avait un sens et n’apparaissait pas comme un épouvantail.

Les magistrats n’ont pas apprécié l’initiative d’un François Bayrou plus enclin à soutenir une collègue amie qu’à garantir l’indépendance de la Justice. Gérald Darmanin a oublié un peu vite que le ministre en charge des impôts est tenu au secret fiscal. Engager un contrôle fut parfois dissuasif. Menacer de rendre publiques des demandes d’interventions relève d’un âge que le nouveau Président est censé enterrer.
Continuer la lecture

Un air de déjà vu

Le changement dans la continuité !
Après l’attentat de Manchester, Emmanuel Macron va demander au Parlement de voter la prolongation de l’état d’urgence et une nouvelle loi pour renforcer les moyens de lutter contre le terrorisme. Deux initiatives qui nous renvoient à l’ère passée, celle des vieux partis et des anciens présidents. A croire qu’il faut avant tout donner le sentiment de faire quelque chose pour rassurer.

Qu’est-ce qu’un état d’urgence permanent ?
Tous les spécialistes estiment que passées les premières semaines, les mesures d’exception qu’il autorise ne produisent plus vraiment d’effet. Les perquisitions nécessaires ont eu lieu ; les rétentions administratives aussi. Mais les libertés publiques demeurent restreintes. Continuer la lecture

La France cul par-dessus tête

L’élection présidentielle de 2017 restera celle de tous les paradoxes. Alors qu’au premier tour, près d’un électeur sur deux a rejeté l’Europe, le pays porte à sa tête le plus europhile des candidats. Lequel n’hésite pas à scénariser sa victoire au son de l’hymne européen emprunté à Beethoven. Presque partout, même chez Emmanuel Macron, il fut question de turbuler le « système ». Le nouveau chef de l’Etat en est le pur produit. Une forte majorité de Français a exprimé ses craintes face à une mondialisation accusée de fermer les usines. Leur nouveau président est un ardent défenseur d’une globalisation heureuse. Le « bas » a contesté le « haut » dans une vive critique des élites incapables de résoudre les problèmes du pays. Emmanuel Macron est le représentant type de l’élitisme national. A croire que le vainqueur figure l’image inversée de l’opinion.

Le mode de scrutin explique pour partie ce miroir sans tain. Le premier tour consacre un quadri-partisme qui réduit le score du candidat d’En Marche à 18,19 % des inscrits. A 465 696 voix près, le second tour aurait opposé François Fillon à Emmanuel Macron, ce qui n’aurait pas donné la même impression de chamboule-tout. La présence de Marine Le Pen, le 7 mai, accentue le vote de rejet, 43 % des électeurs d’Emmanuel Macron reconnaissant avoir voté pour lui d’abord pour éliminer la présidente du Front national. Et les votes blancs ou nuls s’élèvent à 4 millions de voix, soit 11,5 % des votants. L’assise du vainqueur reste donc étroite. Continuer la lecture

Frustrés

Nathalie Kosciusko-Morizet : 2,6 %. Bruno Le Maire : 2,4 %. Au vu de leur score à la primaire de la droite et du centre, c’est peu dire que ces deux députés sortants LR ne représentent pas leur parti. La première le savait ; le second y prétendait. Quelques mois plus tard, les voici prêts à travailler avec le nouveau président de la République qui ne rêve que de faire exploser leur famille politique. Mal reconnus par celle-ci, ils lui tournent le dos. Comme des enfants trop gâtés qui rencontreraient leur première frustration.

Comment vont réagir les électeurs de François Fillon dans la 2eme circonscription de Paris ? NKM  a en effet obtenu d’être investie dans ce haut lieu de la droite, au grand dam de Rachida Dati. Les résultats seront intéressants à observer.

Des novices pas très civils

Nouveaux venus à la politique, vraiment ? Alors que La République en marche annonçait que la moitié de ses 525 candidats étaient issus de la société civile, un examen détaillé de leurs CV fait apparaître que seulement 178 d’entre eux sont de réels novices, soit un tiers. Trente ont déjà été candidats à une élection, 70 ont exercé des fonctions proches des politiques et 3 ont des liens familiaux avec des élus ou anciens élus.

Certains candidats prennent soin de cacher ces liens avec un milieu qu’ils affirment vouloir « dégager ». Dans la 2e circonscription de Moselle, Ludovic Mendès oublie de dire qu’il a participé aux campagnes de Martine Aubry et François hollande en 2011 et 2012. Pour l’essentiel, ces « apparatchiks » viennent de la gauche, la victoire d’Emmanuel Macron leur permettant de sauter les étapes pour devenir députés. Continuer la lecture