Les usines à gaz d’Emmanuel Macron

Habile, Emmanuel Macron ? Certes, et il l’a encore montré devant les maires de France réunis en Congrès. « J’ai besoin de vous », leur a-t-il déclaré en les caressant dans le sens du poil. Cela lui a évité en fin de discours les sifflets qui avaient salué son arrivée. Les élus locaux, pour autant, attendent des actes. Là, le président de la République n’a rien cédé, même s’il a reconnu implicitement que certaines de ses promesses de campagne étaient compliquées à mettre en œuvre. D’où des usines à gaz pour corriger ce qu’il s’est engagé à appliquer.

Emmanuel Macron tient à ce que sa marque de fabrique soit « je fais ce que j’ai dit ». Face à la grogne des maires, il a donc maintenu les décisions qui fâchent. Ainsi de la taxe d’habitation, qui sera progressivement supprimée pour 80 % des foyers qui la paient encore. Un impôt « injuste », dont il reconnaît qu’il le restera pour les 20 % restants. Ce qui pourrait susciter quelque réactions du côté du Conseil constitutionnel. Pour tenter de les prévenir, le gouvernement a choisi de compenser la perte de ressources des communes par la technique du dégrèvement, avec possibilité d’augmenter les taux mais dans des limites bien précises. Bref, une chatte n’y retrouverait pas ses chatons et les maires doutent des engagements de l’Etat dans la durée.
Conscient de la difficulté, le chef de l’Etat promet une refonte totale de la fiscalité locale en… 2020. A charge pour de nombreux et divers comités de réfléchir et de faire des propositions. D’autres conférences devront aussi se pencher sur la politique du logement, sur l’adaptation des règles aux collectivités territoriales, sur des aménagements à la loi Notre concernant des transferts de compétences… Les normes, qui gâchent la vie dans les petites communes, devront être passées au crible pour être allégées. L’Etat deviendra moins tatillon et les élus auront le droit d’innover.
Ce revirement d’un jacobin à l’adresse des pouvoirs locaux tient sans doute au travail pédagogique du président du Sénat et du président de l’Association des maires de France. Il résulte aussi d’un constat simple : s’il veut réussir la révision constitutionnelle qu’il a annoncée, Emmanuel Macron a besoin de se concilier le Sénat et Gérard Larcher, puisque les sénatoriales ne lui ont pas permis de s’imposer dans la Haute Assemblée. D’où cette attention retrouvée pour les maires. D’où l’acceptation probable que le non-cumul des mandats dans le temps ne s’applique pas aux petites communes. D’où la reconnaissance de l’autonomie de gestion des collectivités territoriales au point de leur accorder le droit d’expérimenter sans que l’expérience soit généralisable à tous.
S’il veut faire ce qu’il a dit, Emmanuel Macron doit se chercher des alliés. Ce qui conduit parfois à quelques contorsions pour masquer des abandons. Cela s’appelle la politique. Il est très politique.

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